Ouh la la le nucléaire en France…
Ci-joint le lien vers un article de France Info qui fait mal là où ça passe. Ça parle du premier démantèlement stoppé d’une centrale nucléaire française, à Brennilis en Bretagne. Le démantèlement, c’est la déconstruction pas à pas de la centrale nucléaire (généralement arrivée en fin de vie) par EDF, avec confinement des matériaux radioactifs et dépollution des sols, de façon à remettre le site en état. C’est une opération très coûteuse, mais c’est également un savoir-faire à développer à tout prix pour l’opérateur historique, car le “marché du démantèlement” dans le monde s’ouvre aujourd’hui alors que la plupart des centrales nucléaires des années 70 arrivent en fin de vie : une aubaine pour l’électricien français.
Le démantèlement, ça fait des années qu’on en parle, en particulier à cause de son coût extrêmement important. Enfin, on sait que c’est un coût très important, mais on ne sait pas combien exactement. EDF, respectant la loi, a provisionné (mis en réserve dans l’attente de son utilisation) une somme d’argent pour le démantèlement de ses centrales égale à 15% du coût d’investissement, soit un total de 15 milliards d’euros pour l’ensemble du parc français. Mais aujourd’hui, des études montrent que ce coût sera bien plus important. Les Etats-Unis l’estiment à 25% du coût d’investissement, ce qui représenterait pout la France un surcoût de 10 milliards d’euros. Qui va payer? L’Etat sans doute… c’est-à-dire nous, les contribuables!
On parle également du démantèlement des centrales depuis longtemps parce-que cela n’a encore jamais été fait (en tout cas en France). EDF a beau vouloir rassurer l’opinion en affirmant que le démantèlement d’une centrale est une science maîtrisée qui ne pose pas de problème, force est de reconnaître que Brennilis est un projet “pilote”. Et à ce propos, les premières analyses sur site créent des hics et des hoquets dans la procédure de démantèlement : elles révèlent une contamination anormale autour de la centrale, en cobalt, tritium et césium 137, une sous-évaluation d’une facteur de 30 à 200 du pouvoir radioactif de certains déchets, et une corrosion anormale des … containers de déchets radioactifs eux-mêmes!!!
Voir l’article : www.france-info.com/spip.php?article28850
Le dossier de France Info, qui d’habitude n’est pas forcément anti-nucléaire dans ses propos et reportages, est très complet sur le sujet et permet de mesurer l’enjeu de tels “incidents”. Si on cherche un peu sur le net, on trouve pléthore d’informations à propos du cas Brennilis sur les sites web anti-nucléaire, et à les lire on a tendance à penser qu’en fait EDF ne maîtrise rien du tout de la contamination radioactive engendrée par ses centrales.
En France, le nucléaire a été développé par l’Etat dans les années 70, pour pallier la crise pétrolière. Aujourd’hui, 58 centrales nucléaires fonctionnent, 9 sont à l’arrêt. La part de l’électricité nucléaire dans la production nationale d’électricité est de 78%, le taux le plus fort du monde, dont la part de nucléaire représente en moyenne 16% de l’électricité produite.
Avec une telle part d’électricité nucléaire dans notre bouquet énergétique, il n’est pas sérieux d’envisager d’arrêter tout de suite de produire de l’électricité nucléaire. Ainsi d’après ce que j’en comprends, le débat sur le nucléaire aujourd’hui ne porte pas sur la question “la France doit-elle arrêter toutes ses centrales tout de suite maintenant?” mais plutôt sur la question “la France doit-elle continuer à développer de nouvelles capacités de production nucléaire?”.
Pour le gouvernement actuel, la réponse à cette deuxième question est oui, sans équivoque, au vu du colossal investissement de l’Etat dans cette technologie depuis les années 60, et des marchés possibles pour l’industrie française du nucléaire dans le monde (potentiel à étudier de près, car les risques de prolifération du nucléaire civil vers le nucléaire militaire risquent de diminuer fortement ce marché). Pour le public, c’est plus compliqué. On commence à comprendre l’ampleur des dégâts écologiques et sur la santé humaine des déchets radioactifs. Les risques d’accidents. Les problèmes de démantèlement. On nous a toujours dit “tout va bien, tout est sous contrôle, ne vous inquiétez de rien”, mais chaque jour on se rend compte un peu plus à quel point la France manque de transparence question nucléaire. Pourquoi cacher si tout va bien?
Si on décide d’arrêter le nucléaire (arrêter, c’est-à-dire arrêter de construire de nouvelles centrales et attendre la fin de vie des centrales actuelles, à la différence de sortir du nucléaire, qui signifie ne plus en construire, mais en plus arrêter l’exploitation des centrales actuelles) alors il faudra progressivement remplacer les centrales nucléaires en fin de vie par d’autres moyens de production. Lesquels? Energies renouvelables et propres, mais également énergies fossiles émettrices de gaz à effet de serre. L’Allemagne a fait ce choix. Aujourd’hui elle possède 6% de son électricité d’origine éolienne, en progression vertigineuse de 12% par an depuis près de 10 ans. Mais également 50% d’électricité provenant du charbon avec les émissions de gaz à effet de serre associées. Du coup, sous la pression des engagements de Kyoto, l’Allemagne fait des efforts drastiques pour réduire sa consommation électrique. Celle-ci a diminué de 15% entre juillet 2006 et juillet 2007, ce qui est un excellent résultat si l’on compare avec la France dont la consommation, elle, a augmenté de 1%!
En France, la production d’électricité d’origine éolienne ne décolle vraiment que depuis trois ans. Aujourd’hui sa part dans la production électrique est inférieure à 0,1%. Le taux de progression annuel, cohérent avec ces valeurs extrêmement faibles, est impressionnant : +110% l’année dernière, +200% l’année précédente.
Nucléaire ou pas, quoiqu’il arrive, nous serons obligés de développer les énergies renouvelables. C’est un objectif assigné par l’Union Européenne à chacun de ses pays membres, dans le but de produire 21% d’électricité d’origine renouvelable d’ici à 2020. Avec en plus le défi du changement climatique et ses obligations de réduction des émissions de gaz à effet de serre (l’objectif européen de 21% d’énergies renouvelables va dans ce sens) difficile d’imaginer que la France accepterait de sortir du nucléaire, ou même d’arrêter le nucléaire. Sauf à une prise de conscience soudaine du public français concernant le danger des déchets/effluents/carcasses de centrales nucléaires pour l’environnement et la santé humaine…
Sources:
- Dossier France Info
- Données sur le démantèlement de Brennilis :
- Données sur le coût du nucléaire :
- sur Nucleaire-nonmerci.net
- sur Dissident-media.org (reprend un article des Echos)
- sur Sortirdunuclaire.org (encore!)
- Données sur l’électricité et la part de nucléaire :
- sur le site du Commissariat à l’Energie Atomique (cea.org)
- sur le site de l’Agence pour l’Energie Nucléaire (nea.org)
- sur le site de Total planete-energies.com
- sur le site de l’Agence Internationale de l’Energie (aie.org), la lettre mensuelle des statistiques sur l’électricité
- sur le site de l’AIE, les statistiques par pays
- Objectifs de l’Union Européenne et énergies renouvelables
- sur le site Actu-environnement.com, un article sur le marché des énergies renouvelables
- sur le site de l’Union Européenne (europa.eu), la Feuille de Route pour les sources d’énergies renouvelables
- sur le site de l’Association Européenne de l’Energie Eolienne (EWEA.org) la puissance éolienne installée dans chaque pays membre
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